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Discours/Cérémonie


Discours d'un membre des Etats - E16530331(1)

Nature Discours d'un membre des Etats
Code du discours/geste E16530331(1)
CODE de la session 16530317
Date 31/03/1653
Cote de la source C 7106
Folio 218r-222r
Espace occupé 6,7

Locuteur

Titre Monseigneur
Nom np
Prénom np
Fonction Evêque de Montauban


Texte :

Monseigneur l'evesque de Montauban, deputé avec Monsieur le baron de Peyre et les sieurs capitouls de Tolose et consulz de Carcassonne a dit qu'ils avoient visité par ordre de l'assamblée Messieurs les commissaires presidens pour le Roy et qu'il leur auroit dit qu'il venoit a eux, qui par leurs charges dans la province et par leur commission dans les estatz nous represantoient la personne et l'authorité du Roy, comme les peuples ont accoustumé d'approcher les Rois pour leur faire des demandes et leur porter des plaintes, que les estatz esperoient de leur raison et de leur justice que ce seroit avec succez et avec soulagemant et qu'il ne leur arriveroit pas de mesme qu'a ceux qui moüillent inutillemant de leurs larmes et battent vainemant de leurs paroles des images impuissantes et insensibles, que comme la province avoit appris d'eux mesmes que ses miseres les touchoient et qu'elle n'en scauroit douter, puisque celluy qui tenoit le premier rang d'entre eux estoit né soubz le mesme ciel, formé de mesme sang et eslevé au milieu de la province pour la conduire, a qui le Roy avoit sans doute donné un pouvoir utile a ses subjetz et une authorité advantageuze a leur satisfaction, et que les autres Messieurs avoient esté choisis dans le Conseil du Roy apprès de longues experriences de leur vertu et les preuves considerables de leur intelligence a la conduitte des peuples.
Que c'estoit pour se plaindre de ces maux presans et pour leur en demander une prompte delivrance que l'assamblée des estatz du Lang(ued)oc les envoyoit vers eux, qu'ilz ne leur parleroient point de ces deux fleaux mortelz et desolans de la peste et de la disette, dont il plaisoit a Dieu de frapper cette province, ny mesmes de tous les desordres dont celluy de la guerre, qui est le troisiesme qui l'accabloit, luy faisoit sentir la rigueur.
Qu'ils n'estoient pas venus a eux pour leur redire et leur exposer de nouveau l'horreur des crimes qu'osent attanter les gens de guerre, le corps des estatz s'en estant fait entendre par son illustre teste, dont la bouche leur avoit dit avec tant de force et de sincerité ces abominables actions, et la voix publique, voix de sang et de larmes, leur avoit appris les pillages, les voleries, les meurtres, les massacres, les incendies et les violences dont cette province estoit cruellemant tourmentée.
Que le mal dont ils se plaindroient a eux estoit un mal qu'ilz tolleroient, qu'ils couvroient du nom de l'authorité royale et qui, se trouvant desguisé soubs les couleurs de la justice et les apparences de la raison, estoit receu sans resistence des peuples accoustumés a croire que ce qui porte le nom du Roy est legitime et que ce qui ressemble au bien est bien en effet.
Que la commission de president pour le Roy aux estatz les obligeoit d'employer toutte son authoritté affin d'empecher dans la province touttes les levées de deniers que les estatz n'avoient pas consenties, et que, contre tous ordres et ranversant les loix du pais et par une violence sans exemple tous les dioceses estoient plains de gens de guerre, cruels exacteurs qui a force ouverte et a main armée faisoient valoir des ordres que Messieurs les lieutenans generaux avoint donnez et qu'ilz donnoient encore tous les jours po(ur) lever sur les particuliers des sommes que la province entiere ne scauroit porter, levée injuste en touttes les manieres d'injustice connües par les loix et par la raison, puisqu'elle se faisoit sur des peuples qui ne devoint point ce qu'on leur prenoit et qui ne pouvoint fournir ce qu'on leur arrachoit, injuste en sa forme puisque c'estoit sans deliberation et sans consentemant des estatz, injuste en sa distribution puisque c'estoit sans connoissance et sans proportion du pouvoir et des forces des communautez, injuste en ce qu'elle choquoit un ordre universellemant estably dans cette province de n'y faire que les impo(siti)ons qu'elle a jugé pouvoir porter, injuste enfin en ce qu'elle accable desja un nombre infini de lieux a qui l'on a volé des sommes qu'on ne scauroit regaler en dix années des tailles ordinaires.
Qu'on avoit voulu voir les derniers effortz de l'obeissance du Languedoc sans penser que lorsqu'il ne reste plus rien a faire pour la vertu on prend facilemant une conduitte contraire et que lorsqu'en souffrant on a tesmoigné plus de soumission et de constance on est plus dispozé a une autre resolution.
Qu'ils ne pouvoient ignorer que le Languedoc, en payant ses devoirs legitimes a ses Roys, s'estoit reservé l'honneur de donner tousjours volontairemant, que la province estoit persuadée par une politique aussy ancienne que l'union de son dommaine a la Couronne, que lorsqu'elle n'a pas donné dans ses estatz ce qu'on luy prend soubz le nom du conseil du Roy, on luy arrache violemment et avec injustice ce qu'elle ne doit point.
Que les estatz se souvenoint bien que Monsieur le comte du Roure leur avoit dit que dans ses ordonnances il laissoit au choix des communautez de fournir aux gens de guerre ou de[s] vivres en especes ou des sommes en deniers et qu'il pensoit que la liberté de ce choix suffisoit pour conserver celle de la province, mais que ces choses estant egalemant injustes, le pais n'en pouvoit eslire aucune sans se prejudicier, parce qu'il ne falloit pas moins nostre consentemant pour nous oster nostre pain que nostre argent, outre que la composition de fournir de[s] vivres en espece estoit si cruellemant receüe de la part des gens de guerre et agravée par tant de mauvais traittemans que celluy qui faisoit mine de s'en vouloir servir se croyoit enfin bienheureux d'en relascher et de donner tout son bien pour sauver sa vie et l'honneur de sa famille.
Qu'on ne pouvoit pas trouver aucune apparence de raison a dire que des sommes arrachées de cette sorte fussent données avec liberté, non plus que celles que donneroit un miserable pour se liberer des tourmens de la gehenne et de la torture.
Qu'on devoit souffrir des plaintes si raisonnables puisqu'elles faisoient touttes la consolation du Languedoc, qui ne pouvoit escouter qu'avec douleur celles qu'on luy avoit voulu faire trouver dans les successions que la perte par les frequentes mortz de ses compatriotes luy avoit ouvertes cette année et dans les richesses acquises par l'excessive cherté des danrées qu'une deplorable disette avoit causé dans la province, pour ce que ce qui luy venoit par des pertes si funestes ne la pouvoit point satisfaire, que quelque fallacieuse utilité que l'effrenée avarice s'en peut promettre, c'estoit une pensée si odieuse a la veritable generosité et a la droitte raison que le pais tenoit ces sentimans indignes de trouver place dans des cœurs qui faisoient profession de quelque vertu.
Que la province continueroit de se plaindre autant de temps que l'on fairoit durer ses malheurs et jusques a ce qu'on y eut apporté quelque remede, que si leurs cœurs s'endurcissoient au recit de ces maux tandis qu'elle les porteroit avec douleur et avec une respectueuse tandresse, qu'ilz ne s'estonnassent pas s'ils voyoint enfin le pais emporté a des passions moins circonspectes, puisqu'elles succedent necessairemant a celles dont la province estoit maintenant agitée et que le passage de la douleur au desespoir estoit naturel et facile.
Que comme les estatz avoient subjet de croyre que leur plainte estoit juste, ils estoient asseurez que leurs demandes estoient raisonnables puisqu'ils ne demandoient que d'estre deslivrez des gens de guerre dont les cruelz desportemans occupoient tous les cœurs qui composoient l'assemblée et les randoient muetz pour toutte autre parole que celle qui pouvoit exprimer leur douleur, qu'il n'y avoit personne qui ne voulut se conduire a l'esgard des demandes du Roy sellon les tandresses et naturelles inclinations de ses predecesseurs, mais que la compagnie ne croyoit pas pouvoir opiner avec liberté tandis qu'elle estoit occupée a une attention si funeste et si ravageante, qu'il falloit l'affranchir du mal presant pour la mettre en estat de pouvoir songer a quelque autre chose pour l'advenir, qu'il falloit luy randre sa liberté en esloignant d'elle ceux qui la contraignent, qu'il falloit ayder le pays a faire ce que on desiroit en luy ostant l'obstacle qu'on y avoit miz, que l'authorité sur des esclaves ne faisoit pas grand honneur a celluy qui les commandoit, mais que la puissance sur des personnes libres avoit samblé glorieuse a tous les siecles et a tous les Roys, qu'un petit bien donné estoit plus profitable qu'un grand qu'on arrachoit avec violence, pour ce que le premier estoit plus facilemant exigé et plus commodement mesnagé au lieu que le dernier se ruynoit dans l'exaction et se dispensoit tousjours avec desordre et prodigalité, qu'on eut randu un service signalé au Roy en laissant la province en estat de luy permettre d'accorder a S. M. un don gratuit qui eut esté levé sans dissipation et dispancé avec regularité plustost que d'executer de[s] conseilz violens pour arracher a ses subjetz de force des sommes plus grandes, qu'une violente levée amoindrissoit tous les jours et dont il en restoit enfin dans les mains armées des exacteurs plus qu'il n'en passoit en celles des administrateurs des finances.
Que les estatz ne pouvoient recevoir pour excuse la protestation qu'ilz faisoient de ne pouvoir pas eloigner les gens de guerre pour ce qu'elle n'estoit pas vraysemblable, que le Roy devoit a leur assamblée des commissaires qui peussent remedier a leurs maux, qu'ils respondoient autresfois leurs cahiers dans la province, qu'ilz devoint avoir en leur pouvoir tout ce qui pouvoit estre necessaire a leur soulagemant, qu'autremant il faudroit laisser croire aux peuples que toute cette puissance et cette authorité qui estoit enoncée dans leurs lettres de commissions avec tant de pompe et de force n'estoit qu'un ombre et qu'un fantosme.
Que les estatz trouvoient plus de raison et de bienseance a croire qu'ilz manquoient de volonté [plus] que de pouvoir, mais qu'ilz faisoint ce tort a la province de penser que les troupes qu'ils avoient dans le Languedoc et aux environs de cette ville contribuoint a faire reussir les affaires du Roy en leurs mains par la crainte des maux qu'on pourroit adjouster a ceux que le pais souffroit, plus que ne fairoit la reconnoissance d'un bienfait ou d'une grace receüe s'ils accordoient a la province celle que les estatz leur demandoint.
Que cette pensée estoit injurieuse a la generosité de la province et que, comme la crainte estouffe la voix bien plus souvent que l'amour, elle demeuroit dans la resolution de n'ouvrir ny sa bouche ni ses bources qu'elle ne fut deslivrée des gens de guerre qui l'effrayent et qui l'oppressent.
Que s'ilz s'endurcissoient dans le dessain de faire demeurer les troupes dans la province ils procureroint au moins qu'elles vescussent conformemant aux ordres du Roy, que c'estoit une alternative qu'ils ne pouvoient reffuser sans authoriser un exemple de desobeissance, que les Estatz pensoient que l'intention du Roy estoit renfermée dans les paroles de ses ordres et que ces paroles y ont la mesme signification qu'elles ont accoustumé d'avoir dans l'usage commun et ordinaire, que les estatz traittant les paroles royales comme l'esglise traitte les divines, ils leur donnoient un sens si naturel qu'ilz ne les jugeoient pas susceptibles d'un contraire, que le Roy disoit dans ses ordres qu'il ne falloit nourrir que les effectifz, et pourtant on en faisoit entretenir beaucoup d'imaginaires, que la province estoit devorée par des corpz qui ont de[s] bouches effectives et devorantes dans les maisons qu'ils desolent et qui n'ont point de bras dans les armées et lorsqu'il faut combattre, que douze cens hommes avoient mangé depuis trois mois ce qui suffiroit au payemant de douze mil hommes durant une année et qu'il estoit notoire qu'ilz avoient exigé plus de six cent mil escus des peuples et qu'ils n'ont nulles forces p(rese)ntes.
Que les ordres du Roy portant expressemant qu'ils payeront, il est a presuposer que Sa Majesté leur a fait un fondz, et la province ne scauroit recevoir l'interpretation violente qu'on veut donner a un texte si clair en disant qu'il faut que leurs hostes les payent, puisque c'est une contradiction trop manifeste et qui temoigne un trop grand mespris pour des subjetz si fidelles et si genereux.
Que les estatz estant persuadez de la justice de leurs demandes comme de celle de leurs plaintes, ils esperent qu'on se laissera toucher aux unes et vaincre aux autres et qu'il ne sera pas dit qu'une province qui a si peu de besoin de troupes et qui a chassé les ennemis dehors par ses propres forces et estouffé les factions du dedans par sa fidelité ne puisse pas meriter qu'on congedie des garnisons aussy inutilles a sa conservation que dommageables a son repoz, que le corps des estatz qui a si utilemant servi le Roy en tant d'occasions ne puisse pas obtenir cette recompence, qu'il n'ait de pouvoir que celluy de charger le pais, d'imposer pour le service du Roy, et non pour en obtenir un soulagement si juste et si necessaire, que pour leur donner moyen de servir Sa Majesté envers les peuples et leur faire agreer les duretés utiles au service du Roy dont ils les traittoient si souvant dans leurs assamblées, on devoit leur donner les moyens d'adoucir leur douleur presante et de conserver, en leur procurant quelque bien, la creance qui leur est si necessaire pour les faire consentir dans les occasions aux impo(siti)ons que le Roy leur demande.
Que les estatz demandoient cette justice a tiltre de grace et pour pouvoir addoucir dans l'esprit des peuples une douleur aigrie par de si longz et si mauvais traittemans, pour opposer la consideration d'un bienfait aux cruelles sollicitations du desespoir et pour vaincre les cruelles tentations d'une pauvreté outragée, protestant que la province ne manquera jamais de respect et d'obeissance pour le Roy et de reconnoissance pour Messieurs les commissaires.