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Discours/Cérémonie


Discours de l'un des commissaires du roi - E16581021(03)

Nature Discours de l'un des commissaires du roi
Code du discours/geste E16581021(03)
CODE de la session 16581021
Date 21/10/1658
Cote de la source C 7123
Folio 002v
Espace occupé 8,25

Locuteur

Titre Chevalier, seigneur de Bezons
Nom Bazin, de
Prénom Claude
Fonction Intendant de justice, police et finances


Texte :

Monsieur de Bezons a dit

Messieurs,
Puisque je reçois cest honneur d'acister encores cest année a l'ouverture des estatz de ceste province et que j'ay cest advantaige d'y expliquer les vollontés du roy, je me truve obligé de vous donner de la part de Sa Maigesté des assurances de sa bonté et de son affection et, bien que Monsieur le comte de Roure quy reprezente icy sa personne et qui y supplée celle de Son Altesse Royalle, revenu de la cour parfaictemant instruit de ses intentions, qu'il ne soict un digne interprette et par la place que sa charge luy donne et par sa naissance, ses vertus et son meritte, que l'eloquence de son discours surpasse la foiblesse de mes parolles, je suis neanlmoingz constraint par la comission qu'il m'est donné d'achever imparfaictemant ce qu'il a sy excellement commancé.
Tous ceulx quy ont precedé dans l'employ que j'exerce aujourd'huy n'ont jamais manqué en une pareilhe ocazion de voulloir s'escuzer de parler dans ceste assamblée ; ils se sont servis de cest artiffice pour faire paroistre la beauté de leur esprit et leur eloquence, dont nous voyons de sy belles marques dans noz archives. Ces excluzes estudiées qu'ils affectoint ne sont pas trop legitimes pour moy et, après avoir eu l'honneur de porter sy souvant la parolle dans ceste illustre companie, je me serois vollontiers dispancé de vous faire ung discours quy ne peult estre qu'enuyeux puisque c'est une repetition de tout ce quy a acoustumé d'estre dict en ces ocazions.
Mais, lorsque je meditois a prendre ceste rezollu(ti)on, je me suis aperceu par la lecture des entiens registres et par celle quy vient d'estre faicte des commissions que ceste journée n'est pas consacrée a une journée peurem(en)t de ceremonie, que nos ancestres n'ont pas creu que le discours quy debvoit estre fait en ce lieu feust un sacriffice a l'eloquence et une piece peurem(en)t de curiozitté destinée a satisfaire les auditeurs mais que, dans la charge quy nous est donnée d'entendre les plaintes des publes et a vous de menager leurs intherestz et de satisfaire a ce que vous estes obligés envers l'Estat, nous devrions tous ensemble faire une reflexion serieuze sur l'importance de noz emplois et en protester icy conjoint(em)ant une scincere observa(ti)on.
Ceulx quy envisagent la magesté des rois considerent ceste dignitté comme le souverain bien et un soleil quy n'est cogneu que par la lumiere et son esclat nous empeche d'en examiner la nature ; a la veritté ceste puissance absolue qu'ils ont sur toutes les provinces quy leur sont soubmizes, ceste authoritté quy est inseparable de leurs personnes, ce pouvoir de bien faire aux hommes et tout l'appareil quy les acompaigne impriment avec justice du respect et de la venera(ti)on a tout le monde, que sy a ceste magnificence exterieure l'on y a adjousté qu'un prince quy veult employer sa puissance pour sa satisfaction particuliere ne trouve point d'obstacle a tout ce qu'il dezire, on conclura aizemant que celluy quy a commandé sy souverainement aux publes possede une felicitté parfaite.
Mais lorsqu'un monarque acompli faict reflexion qu'il ne tient sa couronne que de Dieu, il ne doibt pas estre moingz l'image de sa bonté que sa puissance, qu'il est obligé de travailher pour le bien de ses sujectz et de contribuer a leur gloire et a leur advantaige, qu'il doibt raporter toutte l'utilitté de son regne a la felicitté de ses publes, alors ceste dignitté quy apareu avec tant d'esclat ne pert rien de son lustre ny de sa grandeur, mais on s'apercoit qu'elle est acompaignée de tant de soingz et de tant de peynes que les fatigues et les charges du gouvernement egalent ou surpassent les douceurs ou les charmes quy y aparoissent et, bien que la puissance et l'authoritté du souverain doivent estre egalemant respectées dans toutes les partyes de son Estat, les provinces ont neanmoingz leur police particuliere, ces loix municipales et ces privileges que vous tenes de la bonté de noz roix et la fidelitté de vos services ont toujours servi de regle pour la conduitte de celle cy ; et c'est dans cest esprit que Sa Maigesté envoye tous les ans des commissaires a la tenue de vos estatz pour entendre vos dolleances comme partant vos registres a maintenir toutes chozes dans leur premier ordre, ainsy les inteligences quy prezident au gouvernem(en)t de ses corps celestes dont ils ont la conduitte.
Ceppandant, ses peynes et ces fatigues quy acompaignent la royauté seroint insuportables sy elles n'estoint recompansées par une parfaicte fidelitté de la part des subjectz ; quelque passion qu'un prince puisse avoir pour la gloire de son Estat, ceste passion ne produiroict pas les effectz que l'on en attend sy elle n'estoict reciproque par une obeyssance toutte entiere de la part des publes, c'est ce qui a faict dire au chef des academiciens que l'amour et ceste mutuelle correspondance estoint le premier principe de la prodution de toutes chozes, le nœud de la nature est le plus entien de tous les dieux du paganisme dans l'obliga(ti)on ou vous estes de respondre aux sentimens d'affection que le roy a pour ceste province ; c'est a vous a songer a ce que l'on peult justement attendre de v(ost)re zelle et de vostre recognoissance.
Ceulx quy ont faict reflexion sur la grandeur ou s'estoict eslevée la republique romaine et les advantaiges qu'elle avoit remportés sur toutes les autres nations se seroint imaginés que ses victoires estoint fabuluzes sy la veritté n'eust esté apuyée sur le tesmoinage irreprochable de tous les historiens, sy nous ne jugions de l'estendue de leurs conquestes par le debris de leur empire et par les monuments qu'ils ont laissés de leur puissance et de leur domination dans les terres les plus esloignées ; chascun s'est estudié a chercher la cauze de ceste grande eslevation, mais je n'ay pas eu de peyne a la comprandre quand j'ay consideré l'amour que les Romains avoint pour la gloire de leur patrie, le mespris qu'ilz faizoint de leurs vies, de leurs biens et de qu'ilz avoint de plus cher pour rendre leur Republique flurizente ; les Horaces, les Decius, les Scipions et les Marcelus (?) sont dignes de l'imortalitté non pas tant a mon advis par la grandeur de leurs faictz heroiques que parce que toutes leurs entreprizes ont esté acompaignées de ceste justice interieure qui est le prix de la vertu, qu'ils n'ont jamais agy ny combateu que pour l'advantaige de l'empire romain et non pour leur intherest et que, s'ils ont cherché quelque gloire, ca esté celle la sulemant qui repant du meritte de l'action mesme et quy est comme ung rayon de lumiere qui esclaire et qui conduit les autres hommes [à] en entreprendre de semblables.
Aussy, de quoy ne seroit elle point capable, la France ; a quoy ne pourroit elle point prethendre soubz le regne du plus grand monarque que les siecles passés ayent jamais veu sy le zelle des François respondoit à la grandeur de ses entreprizes, sy par nostre mauvaize conduitte nous ne randions pas souvant inutilles les conseils de ce grand ministre qui sera l'admiration de sa posteritté comme il est l'estonnemant de toutes les nations ; ne cherchons point la cauze du retardemant de la paix hores de nous mesme, quelque inclination que le roy aye a la guerre ; quelques charmes et quelques doceurs dont le flattent toutes ses victoires, il souhette ardemant d'adjouster au tiltre d'auguste, de dieu donné, de victorieux et triomphant celluy de pacifique et de pere du puble ; toutte l'Europe est persuadée de ceste veritté et l'Alemaigne peult rendre ung fidel tesmoinage qu'en la derniere diette les Espaignolz ont refuzé toutes les propozi(ti)ons de paix ; ceppandant ceste nation qui croict avoir la sagesse en partaige ne courroit pas a sa ruine prochaine et presqu'assurée sy elle n'esperoit que l'humur inquiette de nostre nation leur pourroit fournir quelque ouverture pour se restablir de leurs dezordres, l'exemple des siecles passés leur faict concerver quelque vaine esperance et ilz ne considerent pas que la fortune et la magnanimitté de nostre monarque et la sagesse de son Conseil dissiperont toujours les influances que des oeuvres malines pourroint verser sur la France.
Mais je crains que, m'estant propozé de faire une reflexion sur les obliguations de nostre devoir, beaucoup de ceulx quy compozent ceste assamblée ne se persuadent que pour y satisfaire de leur part il ne fault avoir au(tr)e objet de leurs deliberations que le soulagement des publes espuisez par une suitte des gueres continuelles ; ilz avouent bien que le roy a une forte inclination pour leur donner du repos, mais ils croint que c'est a eux qui reprezantent ses intherestz a luy faire cognoistre leurs mizeres. Certes, messieurs, ces pensées sont dignes de la grandeur de ceste companie, mais il ne fault pas tellement renfermer une cognoissance sur l'estat de ceste province que vous ne getties les yeux sur les autres pour juger par quelque sorte de comparaizon mais plus encore sur le bezoing et sur l'intherest general du royaume ; la compassion n'est pas toujours une vertu, principalemant lorsqu'elle n'est point acompagnée de ceste prudance politique quy est necessaire au gouvernemant et ce qui s'apelle compassion pour une province particuliere deviendroit une cruauté pour l'Estat ; s'expozant a toutes les entreprizes des ennemis, le roy ascoutte volontiers les resmontrances et les plaintes de ses publes lorsqu'elles sont suivies du respect et de l'obeyssance ; il voit et entend leurs necessittés par la voix de ceulx qui les luy reprezentent mais, comme dans la compozition du corps humain, ce n'est pas l'œil quy juge de ce qu'il void, il n'est pas l'organe qui en introduit les especes, le roi ceste année de l'esclat esleve les cognoissances particulieres qu'elle recoit par la voye des sens, les raporte au bien de son royaume et les espure, s'il fault ainsy dire, de la matiere ou elles estoint attachées ; il n'apartient qu'au souverain de faire ce dicernemant parce qu'il possede ceste sagesse et ceste haulte politique quy ne s'aprend point par estude mais qui vient d'une influance celeste que Dieu versse dans l'esprit de celui qu'il destine a commander aux hommes, c'est ce que le grand Mercure nous apprend, que dans la pratique de toutes les verteus particulieres il y a une loy qui nous conduit chascun a l'exercisse de nostre proffession, mais que la plus parfaitte conciste dans les notions generales qui est au dessus des artz qui se veriffie par la contemplation des chozes universelles et ceste raizon est appellée par Platon la loy royalle parce qu'elle est imitatrice de la divine.
Ausy, messieurs, touttes les foix que vous feres reflexion sur ce que vous deves au roy, a l'Estat et a vous mesme, ne doibt on pas attendre d'une compagnie aussy esclairée que celle cy une ferme rezolution de regler toutes ses deliberations par l'intherest seul du royaume, sans soufrir que les faux zelle et phantosme du bien public, ces sources de tous les dezordres, ces enfans de la malice ou de l'ignorance, fassent aucune impression sur vos espritz ; consultés pour cella les sentimans de vos ancestres, interrogés ceulx qui vous ont precedé, mais plustost interrogés vous mesme et vous trouverés que ceste province, comme elle surpasse toutes les autres par l'advantaige de la nature et par les biens faictz du roy, elle leur sert aussi de regle pour l'obeyssance.
Sy les chozes avoint besoing de quelque authoritté pour les apuyer, l'exemple domestique de Monseigneur l'archevesque de Narbonne me serviroit d'une pr(eu)ve suffizante pour justiffier ceste veritté ; toute la France saict que comme sa fidelitté envers le roy a esté toujours incorruptille, son affection pour les intherestz du Languedoc a esté sans exemple et que, par une generuze verteu digne de sa naissance et de son meritte, il a seu sy bien menager ces deux intherestz qui dans l'esprit des gens de bien n'ont rien de contraire qu'il meritte l'extime du roy et l'aprobation de la province.
Enfin, fault il adjouster encores quelques considerations pour vous fortiffier dans ceste rezolution desinteressée que vous avés toujours eue pour la gloire de cest Estat : l'exemple de la conduitte de nostre monarque vous doibt elle pas determiner a satisfaire ceste obligation et, pour ne pas sortir des bornes que je me suis propozé, quelles graces pourrés vous attendre de ce grand prince qu'il ne les aye repandeus liberalemant sur vous, n'a il pas prevenu vos besoingz par les faveurs, n'a t il pas randu son regne triomphant et glorieux par ceste foule de victoires et de conquestes, n'antandés pas que je vous en face icy une enumeration particuliere c'est le subjet d'une histoire toutte antiere, les triomphe des Alexendres et des Cezars ne servent que d'une ombre pour relever l'estat de ceulx de nostre prince, il est au dessus de tous les eloges et la grandeur de ses actions s'exprime mieux par le silence que par aulcung panegerique, c'est de ceste facon que Dieu peult estre loué (dizoict Sinesius) parce que toutes les parolles sont trop foibles pour atteindre au meritte de ses actions et, certes, Messieurs, je ne lis rien d'esgal dans toutte l'antiquitté quand je vois le roy quiter les delices que son aage et sa condition luy offrent, marcher a teste de ses armées, porter partout la victoire et la terreur et que les nations mesmes qu'il a vaincueus au milheu des dezordres que la guerre traine avec elle ne trouvent rien de facheux sous sa domination qu'elles fassent des vœux pour sa prosperitté et qu'elles portent envie aux publes quy sont nez ses subjectz, dizons de plus qu'elles concoivent de la jalouzie de nostre bonne fortune et que, fachés de ne tomber soubz sa puissance que par la voye des armes, elles cherchent toutte sorte de moyens pour l'acquerir pour maistre.
Ceppandant que tout luy fait jour (?) et que rien ne resiste a la force de ses armées, une maladie funeste suspend nostre (lacune) et menace la France de la plus grande perte qu'elle puisse jamais ressentir, icy la sulle memoire des dezordres dont nous estions menassés m'interdit l'usage de la parolle, semblable a ceulx quy dans une fuitte necessaire passent par des principes, sans considerer le peril ou ils sont et tremblent après au souvenir des maux qu'ils ont esvités ; vous scavés, Messieurs, les vœux publicz et particuliers que vous aves faictz pour ceste santé sy pretiuze a toutte l'Europe et la joye que vous avés conceue de ceste guerizon miraculuze, mais lorsque vous considerés que ceste maladye estoit l'effet des travaux qu'il avvoit pris pour nostre propre conservation et pour abattre l'orgueil de ses circonciliables ennemis de la France, qu'a peyne sa santé estoit elle restablie qu'il songeoit a retourner sur la frontiere pour couronner ce grand ouvrage de la conqueste de Flandre, que, pandant qu'il travailhe sy glorieuzemant au dehors, SAR a maintenu la quiettude au dedans de l'Estat et a vouleu que les terres de son appanage donnassent l'exemple d'une parfaitte obeyssance, elle a faict cesser un comencemant de dezordres qui n'ont pas peu estre apaizés que par de grandz suplices ; certes, Messieurs, après que le roy a sy glorieuzemant sacriffié toutes chozes pour l'advantaige de ses publes, après l'exemple illustre de SAR et celluy de tous les ordres et de toutes les provinces du royaume, j'aurois peyne a croire que vous seulx ne voulussiés pas remplir toutte l'attente que l'on a conçue de vostre affection et je me persuade que vous signalerés une année illustre par tant de triomphes par des liberalités et de recognoissances extraordinaires.
J'ay souvant protesté dans ce lieu la passion que j'avois de respondre par mes services a la bonté que la province m'avoit tesmoignée, c'est avec desplaizir que jusques a prezant je n'ay pas peu le faire aussy utillemant que je m'estois propozé, je ne puis, Messieurs, qu'en conserver une recognoissance toutte entiere pour, en tous les lieux ou je me trouveray, chercher avec empressement les ocazions de tesmoigner la veneration que j'ay pour la province en general et pour tous les particuliers quy la compozent.