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Délibération 16820110(06)



Nature Mémoire, pièces diverses. à l'appui d'une délibération
Code de la délibération 16820110(06)
CODE de la session 16811120
Date 10/01/1682
Cote de la source C 7213
Folio 57v-61v
Espace occupé 7,5

Texte :

Memoire sur les affaires de la manufacture de Clermont.
Monseigneur le duc de Verneuil et Messieurs les autres commissaires president pour le Roy aux Estatz de la province de Languedoc ayant fait leurs instances au nom de Sa Majesté pour faire connoistre ausditz estatz l'avantage qui revient a la province de l'establissement des manufactures et leur demander en mesme tempz d'examiner les moyens que l'on pourroit prendre pour soutenir celle de Clermont de Lodeve qui est dans le desordre par le mauvais estat des affaires des manufacturiers et de ceux qui en ont fait l'establissement, l'assemblée desditz Estatz nomma des commissaires de tous les ordres pour conserter les moyens avec Messieurs les commissaires du Roy et pour recevoir toutes les propositions qui leur seroit faites de leur part au nom de Sa Majesté.
Mais comme les interessez a cette manufacture qui pouvoient rendre compte de l'estat present de leurs affaires n'estoient point a Montpellier et qu'il n'y avoit personne de leur part qui se presentat pour donner les memoires necessaires, Messieurs les commissaires du Roy n'ayant pu conferer avec ceux desditz Estatz que le cinquiesme du present mois de Janvier, Messieurs les commissaires desditz Estatz n'ont pu s'assembler que le lendemain sixiesme chez Monseigneur le cardinal de Bonsy pour examiner les propositions qui ont esté faites et les moyens que l'on pourroit prendre pour soutenir cette manufacture suivant l'intention de Sa Majesté.
On a commencé dans cette conferance par agiter que la manufacture de Clermont estoit utile a la province et l'on convient qui si l'on avoit demandé l'avis des Estatz lorsque l'on en fit l'establissement, ilz auroient eu de la peine d'y consentir par ce qu'il y en avoit suffisamment dans la province et qu'il auroit mieux valu aider les marchandz des autres manufactures qui sont establies depuis longtempz pour les faire valoir et les perfectionner que d'employer cent mil escus en bastimentz et mestiers et outilz necessaires pour en establir une nouvelle qui ne se proposoit que de faire davantage, d'autant plus que ceux qui l'entreprenoient n'estoient pas marchandz et n'avoient pas la connoissance qui leur estoit necessaire pour faire un establissement de cette qualité et s'il a falu convenir que cette manufacture en l'estat qu'elle a esté mize et qu'elle est a present peut estre utille a la province par la consommation qui se fait de quelques laines de pays et des denreez necessaires pour l'entretien des ouvriers et de l'avantage qui en revient au commerce, les commissaires des Estatz ont regardé cette affaire comme trèz mauvaize en soy par la conduite de ceux qui l'on entreprize, et discutant en la presence de Monsieur d'Aguesseau les moyens que l'on pourroit prendre pour soutenir cette manufacture, ilz ont examiné les propositions qui ont esté faites de la part des manufacturiers qui consistent a dire:
Qu'ilz doivent sept cent cinquante mil livres suivant l'estat qu'ilz en ont remis et que pour payer cette somme, la societé a des effetz pour trois cent cinquante mil livres, sans a ce comprendre les bastimentz et les terres de la manufacture, les outilz et mestiers qu'ilz estiment deux cent quatre vingt dix huit mil cinq cent quatre vingt trois livres ny les actions de la societé contre le sieur Brutel l'un des interessez et plusieurs autres, qu'ilz font revenir a deux cent vingt quatre mil sept cent trente neuf livres.
Et comme par le projet qu'ilz ont fait pour l'acquittement de leurs debtes ilz ne comptent pas sur les actions qu'ilz ont contre ledit Brutel et autres particuliers, ilz disent qu'ilz ont besoin de quatre cent mil livres pour achever de payer ce qu'ilz doivent, cependant il n'y a qu'a lire l'estat de leur effetz qu'ilz dizent estre liquidés et qu'ilz font revenir a trois cent cinquante mil livres pour juger qu'il n'y a pas lieu de l'escrire et qu'ilz se mecontent sur cet article comme ilz se sont mecontez dans leur entreprize, car outre qu'ilz ne peuvent pas justifier que cet estat soit veritable, ilz ne peuvent pas dire que ces effetz sont bons et liquides pour en payer pareille somme a leurs creantiers et par consequand il seroit mal avizé de pouvoir asseoir un jugement certain la dessus comme il seroit pourtant necessaire de faire parce qu'il s'agist de payer pareille somme de trois cent cinquante mil livres qui est veritablement deue.
Le compte qu'ilz font pour payer les quatre cent mil livres restans a paru encore plus incertain car ilz disent que les cinq cent pieces de drap qu'ilz fabriqueront leur produiront quatre mil livres de proffit chaque année, compris une pistole de chaque piece de drap que Sa Majesté donne plus quatre mil deux cent livres par an qu'ilz pretendent pouvoir retirer du revenu de leur fondz de terre et quatorze mil quatre cent livres chaque année sur la vente des denreez qu'ilz fournissent a leurs ouvriers pour leur subsistance, scavoir un escu sur chaque cestier de bled, plus qu'il ne vaut au marché, vingt livres sur chaque muid de vin outre ce qu'il peut valoir dans le cours ordinaire et ainsy sur les autres denreez.
De sorte que tout cela compris ilz pretendent pouvoir profiter pour la fabrique de cinq cent pieces drap environ quarante mil livres chaque année et ilz disent qu'ilz payeront les quatre cent mil livres restant de leurs debtes en huit anneez pourveu que le roy et la province leur prestent deux cent mil livres pour dix anneez sans interestz et voicy comme ilz font leur compte.
Le profit qui leur doit revenir de ce commerce dans lesdites huit anneez a raison de quarante mil livres par an monte trois cent vingt mil livres et il ne sera deu a la fin de la huitiesme année que quatre vingt mil livres.
Ilz pretendent payer dans ces mesmes huit anneez leurs creantiers sans interestz en quatre payements egaux qui reviennent a trois cent vingt mil livres mais ilz se trompent car il faudroit bien qu'ilz se servissent du profit de la neufiesme et dixiesme année pour payer les 80 000 l. qui resteront a payer des quatre cent mil livres.
Ce compte a paru trez incertain par plusieurs raisons, la premiere parce qu'il n'est pas asseuré que les effectz qu'ilz font revenir a trois cent cinquante mil livres soient bons et liquides et il ne faut que lire l'estat qu'ilz en ont baillé pour en juger autrement, la seconde parce que le profit de quarante mil livres par an qu'ilz pretendent faire sur cinq cent pieces de drap pour le payement de leurs debtes est compozé de quatorze mil quatre cent livres qu'ilz pretendent gagner sur les denreez qu'ilz vendent a leur ouvriers au dela de leur juste prix, de quatre mil deux cent livres du revenu de leur fondz de terre, de 5 000 l. de la pistole par piece que le Roy aura la bonté de leur donner et de 16 200 l. sur la fabrication de leurs marchandises, ce qui fait voir que ce compte est fort incertain et par consequent que le payement de leurs debtes n'est pas assuré.
Il faut pourtant par cette proposition que le Roy et la province prestent deux cent mil livres sans interest pour dix ans et que les creantiers perdent encore non seulement les interestz qui courent mais encore l'interest pendent lesd. dix anneez et comme les deux cent mil livres qu'ilz demandent au Roy et a la province doivent estre payables en 1682 et 1683, il arrivera que leur compte n'estant pas juste, soit pour les trois cent cinquante mil livres des effets qu'ilz dizent estre liquides, soit par les quatre cent mil livres qu'ilz pretendent tirer du profit de la fabrique de leurs draps, que les fonds qui doivent faire la sureté du Roy et de la province seront consommez, que les deux cent mil livres seront perdues et qu'alors il n'y aura nul moyen de soutenir cette manufacture suivant l'intention du Roy parce que tous les secours qu'elle peut recevoir seront espuisez.
Leurs propositions ayant esté discuteez de bonne foy et dans le dessain de les accepter si elles avoient esté raisonnables, on a trouvé que l'on ne pouvoit establir rien de certain sur un projet de cette nature et que le Roy et la province ne doivent pas hazarder une somme si considerable pour une affaire dont l'evenement est aussy incertain.
Les commissaires du Roy n'ont pas demeuré la et ilz ont voulu examiner si cette manufacture pouvoit se soutenir par une nouvelle compagnie au cas que l'on trouvat des gens propres pour cela et qui vouleussent y travailler, mais on a jugé qu'une nouvelle compagnie seroit d'une plus grande despense et pour le Roy et pour la province parce qu'il n'y a personne qui vouleut entrer dans une affaire comme celle la dont le commerce est sy incertain si le Roy et la province n'acheptoient en pure perte les bastimentz et les fonds des terres, les outils et les mestiers et mesme si on ne les aydoit de quelque choze pour la fabrique de leurs drapz, il est vray que par ce moyen la manufacture pourroit subsister, mais les commissaires des Estatz ont jugé que les avantages qui en pourroient revenir ne vaudroient pas ce que le Roy et la province mettroient d'autant plus qu'il ne manque pas de manufactures dans la province de Languedoc et qui sont beaucoup meilleures que celle la.
Les mesmes commissaires pourtant et l'assemblée des Estatz n'ont pas voulu se separer sans prendre quelque resolution qui peut estre agreable au Roy et considerant que si l'on n'ayde pas a present les interessez en ladite societé pour les faire travailler, que la manufacture tomberoit sans resource.
Ilz ont deliberé aprez avoir pris l'avis desditz interessez de faire un fondz de quarante mil livres pour le travail actuel qui se doit faire cette année et par ce qu'il faut achepter des laines au mois de may prochain pour le travail de l'année 1683, que l'on fera aussy un fondz de vingt ou trente mil livres pour les achepter en prenant toutes fois les seuretez necessaires pour lesditz quarante mil livres, soit par la vente des draps qu'ilz ont actuellement dans leur maguasins, soit par les draps qui seront fabriquez pendent le cours de l'année et a l'egard des laines, comme les Estatz donneront ordre de les achepter et que l'on ne les travaillera qu'en l'année 1683, ilz en seront les maitres et les garderont pour s'en servir suivant l'intention du Roy, lequel est trez humblement supplié de considerer que la province n'est entrée dans la discution d'une affaire comme celle la que parce qu'elle luy a ordonné de le faire et qu'elle desire de luy plaire dans toutes les occasions qui se presentent, elle espere mesme qu'aprez avoir fait examiner tous ces moyens, qu'elle ne voudra pas que la deliberation des Estatz soit executée puisqu'il n'est pas possible de soustenir cette manufacture par de faibles secours avec ceux qui l'ont establie, et que tout autre moyen demande une despense trez considerable qui vaudra tousjours mieux que ce que l'on en pourra retirer d'utilité et d'avantage.
Les Etastz ont deliberé de faire scavoir leur resolution a Sa Majesté par un courrier exprez afin qu'en cas elle voulut bien qu'elle feut executée on commencat au plutost de faire les fondz necessaires pour les premiers mois de cette année suivant les ordres qu'ilz donneront avant se separer.
On attache a ce memoire la proposition faite de la part des manufacturiers avec les estatz du produit pretendu de la fabrique de cinq cent pieces de drap et de leurs effetz bons et liquides, signé le cardinal de Bonsy president.

Economie 16820110(06)
Draperie
Les Etats consentent à emprunter 70 000 l. pour soutenir la manuf. de Clermont pendant 2 ans, pour plaire au roi et pour empêcher une ruine totale, mais espèrent que le roi ordonnera que cette déliberat. ne soit pas exécutée car elle ne sera pas efficace Action des Etats

Agriculture, élevage, commerce, industrie

Economie 16820110(06)
Draperie
L'ass., tout en reconnaissant quelque utilité à la manuf. de Clermont (elle utilise les laines de la prov. & fait travailler les ouvriers), dénonce son mauvais état : les 1ers entrep. ne sont ni des marchands ni compétents; les autres man. sont meilleures Action des Etats

Agriculture, élevage, commerce, industrie

Economie 16820110(06)
Draperie
Les propositions des manufacturiers de Clermont pour redresser leur manufacture sont illusoires, leurs comptes pour rembourser leurs dettes sont erronés, et les 400 000 l. qu'ils demandent au roi et à la province seraient prêtées en pure perte Action des Etats

Agriculture, élevage, commerce, industrie

Economie 16820110(06)
Draperie
Une nouv. compagnie pour sauver la manuf. de Clermont ne serait pas viable (difficulté de trouver des gens qui veuillent y travailler, bâtiments à racheter, grandes dépenses pour un commerce incertain) d'autant plus qu'il y a assez de manuf. dans la prov. Action des Etats

Agriculture, élevage, commerce, industrie

Economie 16820110(06)
Prix et salaires
Un des moyens sur lequel comptent les 1ers entrepreneurs de la manufacture de Clermont pour payer leurs dettes est la vente aux ouvriers des denrées de leur subsistance à un prix supérieur à celui du marché, dont ils tireraient un gain de 14 400 l. Action des Etats

Agriculture, élevage, commerce, industrie