aide
Délibération 17880108(07)
Nature |
Délibération en séance plénière |
Code de la délibération |
17880108(07) |
CODE de la session |
17871213 |
Date |
08/01/1788 |
Cote de la source |
C 7643 |
Folio |
318-329 |
Espace occupé |
11,4 |
Texte :
Commission des Travaux-Publics. Sixieme rapport.
Monseigneur l'évêque de Montpellier a dit : Que le sieur de Montferrier a fait le rapport à la Commission de tout ce qui concerne le nouveau canal de Narbonne, qui vient d'être achevé depuis le Canal-Royal jusques à la rivière d'Aude & l'ancien canal nommé la Robine, qui part de cette rivière, traverse la ville de Narbonne, & conduit au Grau de la Nouvelle.
Que la dernière assemblée des Etats fut informée qu'avant de pouvoir établir la navigation dans le nouveau canal, il restoit encore, 1°. Cinq écluses à finir, dont deux étoient presque achevées, & les trois autres à moitié faites. 2°. A construire à la prise d'eau une demi-écluse, de l'exécution de laquelle MM. les propriétaires du Canal-Royal devoient être chargés, après qu'on auroit convenu du prix avec eux. 3°. A achever les déblais de la cinquième & de la sixieme retenue qui étoient bien avancés. 4°. A poser la plus grande partie des crapaudines en bronze pour les portes des écluses, & à construire & mettre en place dix de ces portes, & tous les empellements de leurs tambours.
Qu'il fut rapporté en même-temps que MM. les propriétaires du Canal-Royal avoient fait remettre par leur procureur-fondé une soumission par laquelle ils offroient de construire la demi-écluse, conformément au devis qui en avoit été dressé par le sieur Ducros, moyennant le prix de quinze mille livres qui fut accepté par la délibération des Etats.
Que le logement du garde de la demi-écluse n'ayant pas été compris dans ce marché, les Etats autoriserent MM. les Commissaires des Travaux-Publics pendant l'année à traiter du prix de ce logement avec MM. les propriétaires du Canal-Royal, ou en adjuger la construction dans le cas où ledit prix ne seroit pas convenu.
Qu'enfin, par la même délibération, les Etats acceptèrent la soumission faite par le sieur Fornier pour la fourniture des arbres destinés à être plantés sur les francs-bords du nouveau canal.
Que toutes les dispositions pour achever le canal étant ainsi faites, il ne restoit plus qu'à travailler promptement à leur exécution, lorsque le 15 janvier dernier, la rivière d'Aude s'étant élevée de dix-sept pieds cinq pouces, elle affouilla jusques au tuf à douze pieds de profondeur moyenne au-dessous des basses-eaux l'embouchure du Canal de Narbonne, sur toute la longueur de l'éperon qui en défend la tête.
Que cet événement ayant donné lieu de craindre qu'à l'avenir & peu-à-peu, de pareilles inondations ne creusassent peut-être le tuf dans lesquels sont enfoncés les pilots qui supportent l'éperon, & que ces pilots venant ainsi à être déchaussés, cet ouvrage important ne vînt à crouler, le sieur Ducros estima qu'il étoit indispensable d'envelopper tout le pourtour dudit éperon par une berme en maçonnerie de giron ; & comme il auroit pu survenir de petites crues d'eau, qui en entraînant du gravier ou du limon sur ce tuf, auroient rendu cette réparation impraticable, on profita promptement de l'avantage momentané qu'avoit procuré la grande inondation en déblayant entièrement tout ce qui recouvroit le terrein ferme, & on se hâta de recouvrir ce terrein par une berme en maçonnerie de giron d'environ cinq pieds d'épaisseur, & d'assurer ainsi pour toujours la fondation d'un grand ouvrage qui, sans cela, auroit vraisemblablement éprouvé tôt ou tard des dégradations considérables.
Qu'en même-temps que MM. les Commissaires des Travaux-Publics pendant l'année furent informés de la nécessité de cette réparation, il leur fut rendu compte que la même inondation qui avoit produit l'affouillement de l'éperon avoit aussi beaucoup creusé le lit de la rivière en avant de l'embouchure du canal ; mais que ce recreusement, ainsi que l'affouillement dudit éperon, s'étoient faits en grande partie au détriment de la partie du canal comprise entre la rivière et l'épanchoir, la violence des eaux y ayant entraîné une grande quantité de limon & même de gravier ; qu'il étoit à présumer que l'enlèvement de ces dépôts pourroit être fait avec la pelle, au moyen d'un batardeau & des épuisements ; mais qu'on ne pouvoit être assuré de réussir par ce moyen qui étoit le plus prompt & le moins dispendieux, y ayant à craindre que la difficulté des épuisements n'obligeât à recourir à l'usage long & coûteux des dragues & des pelles à dégravoyer.
Que MM. les Commissaires des Travaux-Publics ayant reconnu la nécessité de faire travailler promptement & avec intelligence au recreusement de cette partie de canal, ils déterminèrent dans leur assemblée du 27 mars que ce travail seroit fait par économie ; ce qui a été exécuté & achevé le 25 août dernier, au moyen d'une dépense de quatre mille onze livres six sols huit deniers.
Que la même inondation encore ayant emporté une partie de la rampe par laquelle on aboutit du pont de l'écluse du Gaillousti au bac de Salelles, quoiqu'elle fût, ainsi que ces taluds, revêtue d'un gros caladat, cette rampe a été réconstruite avec soin ; que de plus ayant été reconnu qu'un ancien épi construit en maçonnerie sur le bord gauche de la rivière d'Aude, au-dessus de l'embouchure du canal, occasionnoit des dépôts au-devant de cette embouchure, cet épi a été démoli, & le bord de la rivière a été redressé en cet endroit, & que les dépenses faites pour ces divers objets & pour quelques menues réparations aux chaussées du Gaillousti, ajoutées à celle qui a été faite pour le rempiétement de l'éperon, se portent, d'après les pieces justificatives qui en ont été remises , à la somme de trois mille six cents quarante-deux livres cinq sols dix deniers.
Que pendant qu'on travailloit ainsi par économie à remettre en bon état tout ce que l'inondation avoit dégradé, les divers entrepreneurs ont de leur côté mis une telle activité dans la suite de leurs travaux que toutes les maçonneries des écluses ont été achevées vers la fin du mois de juillet.
Que MM. les Commissaires des Travaux-Publics s'étant assemblés le seize dudit mois, il leur fut rapporté une soumission par laquelle le sieur Andreossy, Directeur du Canal, offroit au nom de MM. les propriétaires dudit Canal de se charger de la construction du logement pour le garde de la demi-écluse, moyennant la somme de trois mille livres qui étoit celle qu'avoit coûté, prix moyen, chacun des logements pareils construit pour les autres écluses. Qu'en même-temps il leur fut observé qu'il étoit convenable de construire, avant l'introduction des eaux, une partie des prolongements des murs d'épaulement qui devoient lier cette demi-écluse avec le pont qui reste à construire à la réunion des deux canaux ; & que ledit sieur Andreossy offroit de se charger de la construction de ces prolongements sur douze toises de longueur d'un côté, & huit toises de l'autre, au prorata de la somme convenue pour la demi-écluse : que sur ce rapport, MM. les Commissaires, ayant accepté la soumission dudit sieur Andreossy, tant pour les prolongements desdits murs d'épaulement, que pour la construction du logement du garde de la demi-écluse, il fut travaillé de suite à l'exécution avec beaucoup d'activité, & tout fut achevé vers la fin de septembre.
Qu'il a été procédé à l'estimation des terres prises pour contenir les déblais provenus des recreusements du Canal dans les terroirs de Truillas & de Salelles, & que d'après le verbal du sieur Laforgue, expert, les indemnités dues pour cet objet se portent, y compris les journées dudit expert, à la somme de quinze cents cinquante-neuf livres treize sols.
Que le sieur Ducros a remis les toisés définitifs de tous les ouvrages qui ont été finis l'année dernière ; lesquels toisés sont, 1°. Ceux des cinq écluses au-dessus de celle de Salelles, qui se portent ensemble, y compris les cinq logements des garde-écluse, à la somme de deux cents quatre-vingt-treize mille quatre-vingt-quinze livres huit sols un denier, pour solde de laquelle il a été payé soixante-quatre mille quatre-vingt-quinze livres huit sols un denier en 1787.
2°. Celui des recreusements des quatre premières retenues au-dessus de l'écluse de Salelles, se portant à la somme de cent six mille neuf cents dix-sept livres sept sols trois deniers pour fin de paie, de laquelle l'entrepreneur a reçu neuf mille quatre cents dix-sept livres sept sols trois deniers.
3°. Celui des recreusements de la cinquième & de la sixieme retenue, celui-ci se terminant au Canal-Royal ; lequel toisé se porte à la somme de cinquante-trois mille neuf cents douze livres un sol huit deniers, qui est entièrement payée au moyen de celle de quatorze mille quatre cents douze livres un sol huit deniers que l'entrepreneur a reçu depuis les Etats derniers.
4°. Celui des seize portes des écluses & des trente empellements de leurs tambours, montant à la somme de quarante-un mille huit cents quatre-vingt-trois livres quatorze sols pour fin de paie, de laquelle l'entrepreneur a reçu vingt-deux mille huit cents quatre-vingt-trois livres quatorze sols un denier.
5°. Le détail du poids des crapaudines en bronze, d'après lequel elles se portent à la somme de neuf mille sept cents soixante-seize livres dix-huit sols, pour solde de laquelle les fondeurs ont reçu trois mille quatre cents dix livres deux sols en 1787.
6°. Le toisé des prolongements des murs d'épaulement de la demi-écluse, lequel se porte à la somme de deux mille sept cents quatorze livres seize sols quatre deniers qui a été payée à MM. les propriétaires du Canal, ainsi que celle de quinze mille livres pour le prix en bloc de la demi-écluse, & celle de trois mille livres pour le logement du garde de cette demi-écluse.
7°. Le toisé d'un pont provisoire qui a été construit sur la demi-écluse pour servir à la continuité du chemin du tirage du Canal-Royal, ledit toisé se portant à cinq cents quatre-vingt-huit livres onze sols cinq deniers.
8°. L'état des arbres fournis par le sieur Fornier pour les plantations sur les francs-bords du canal, conformément à sa soumission acceptée par les Etats, ledit état se portant, y compris les frais faits pour planter lesdits arbres & pour les entretenir, à la somme de deux mille vingt-six livres six sols six deniers.
Que MM. les Commissaires des Travaux-Publics, assemblés le 27 mars, ayant jugé convenable d'établir sur le nouveau canal un garde à bandoulière qui empêcheroit la dépaissance des troupeaux sur les francs-bords & taluds, tant de ce canal que de celui d'atterrissement qui y est contigu, & arrêteroit les diverses entreprises des particuliers contre les ouvrages de la Province, il a fallu disposer une partie de la maison construite au-dessus de l'épanchoir de manière à servir de logement à ce garde ; qu'il a été nécessaire aussi de poisser & peindre de nouveau les empellements dudit épanchoir, démolir un mur provisoire qui barroit l'écluse du Gaillousti, enlever des dépôts faits dans cette écluse, placer sur les bords du canal près de la rivière des amarres en pierre de taille, & pourvoir à diverses menues dépenses pour rajuster les environs de l'épanchoir ; tous lesquels objets se portent, d'après le détail accompagné des pièces justificatives qui en a été remis, à la somme de treize cents soixante-six livres dix-huit sols onze deniers.
Que plusieurs petites crues de la rivière d'Aude, survenues vers la fin du mois d'août & dans le courant de celui de septembre, ayant formé à diverses reprises dans le canal, entre la rivière & l'épanchoir, de nouveaux dépôts, il fut indispensable de travailler sans relâche à les enlever avec des grapins, & que ce n'a été que le 8 octobre qu'on est parvenu, au moyen d'une dépense de trois mille six cents vingt livres quatorze sols six deniers, à donner à cette partie de Canal une profondeur d'environ quatre pieds & demi d'eau, qui étoit absolument nécessaire pour que les barques chargées pussent y passer.
Que dès que le passage fut libre, trois barques marchandes qui étoient à l'attente depuis quelques jours s'empressèrent d'en profiter, & arrivèrent à Narbonne le 9 octobre, au milieu d'un concours innombrable des habitants de la ville & des environs, qui témoignoient à l'envi leur joie & leur reconnoissance pour l'établissement d'une navigation aussi utile que longtemps désirée ; & que depuis, cette navigation s'étant faite sans interruption, il est arrivé successivement plus de trente barques chargées de grains & autres denrées dont plusieurs se sont chargées en retour de sel, de vin & de salicor, & qu'il résulte du calcul fait par les négociants de Narbonne qu'ils épargnent sur le chargement de chaque barque de trois à quatre cents livres sur les frais qu'ils étoient obligés de faire précédemment à raison du transport par charrette.
Que peu de jours après que les eaux eurent été introduites dans le nouveau canal, on s'apperçut qu'il en filtroit une quantité assez considérable à travers le terrein graveleux dans lequel il est creusé presque partout ; que vers la fin d'octobre, on les vit surgir au-dessus de la surface du terrein dans les olivettes des environs de Salelles, sur environ trois cents toises de longueur & six cents de largeur, dont deux cents toises du côté de Salelles & quatre cents du côté opposé ; que ces filtrations ne pouvant manquer de porter le plus grand préjudice auxdites olivettes, le sieur Ducros se hâta d'en rendre compte à MM.les Commissaires des Travaux-publics & de leur proposer les moyens qui, d'après la vérification détaillée qu'il avoit fait du local, lui paroissoient propres à délivrer promptement les possessions des environs de Salelles des eaux qui les recouvroient & à les en préserver pour l'avenir ; que ces moyens consistoient à creuser des contre-canaux en dehors des francs-bords du canal au-dessus de l'écluse de Salelles, sur environ trois cents toises d'un côté & près de six cents de l'autre, & à faire partir de chacun de ces contre-canaux des fossés qui en ameneroient les eaux d'un côté au ruisseau nommé rec-Caudiez qui étoit très-proche, & de l'autre au béal du moulin de Salelles & à l'aqueduc construit entre le village de ce nom & l'écluse double ; que l'exécution de ces moyens ayant été ordonnée par MM. les Commissaires, il y a été travaillé depuis avec tous les pionniers qu'on a pu se procurer, en sorte que les contre-canaux & les fossés qui doivent en vuider les eaux seront tous incessamment achevés, & que les olivettes & autres possessions des environs de Salelles se trouvent presque toutes délivrées des eaux qui les submergeoient.
Que ces eaux ayant fait périr les grains qui avoient été semés dans divers champs, & excité les réclamations des riverains & de la communauté de Salelles, les Etats jugeront sans doute convenable de charger le sieur Ducros de faire procéder à l'estimation des indemnités qui pourront être dues pour cet objet.
Qu'après avoir ainsi rendu compte de tous les ouvrages faits cette année au canal de Narbonne & des succès de la navigation qui y est établie depuis le 9 octobre, le sieur de Montferrier a ajouté que cette intéressante & essentielle navigation est dans une espece d'état précaire à cause des dépôts que les inondations de la rivière d'Aude laissent dans la partie du canal qui reçoit les eaux de cette rivière ; que ces dépôts ne pouvant être attribués qu'à ce que les eaux ne courent pas avec assez de vitesse entre la rivière & l'épanchoir, c'est à augmenter cette vitesse qu'il faut indispensablement s'attacher ; que l'on voit par le mémoire du feu sieur Garipuy, concernant le projet du canal de Narbonne, dont le rapport fut fait aux Etats en 1775, que ce Directeur pensoit qu'en levant les pales les plus basses de l'épanchoir d'atterrissement, les eaux supérieures de la rivière s'y porteroient avec assez de rapidité pour entraîner tout ce qui pourroit s'être déposé dans le canal ; que cette assertion étoit fondée sur ce que le seuil des pales les plus basses étant fixé à six pieds au-dessous de la surface de l'Aude, il devoit en résulter une chute de six pieds qui ne pouvoit manquer d'attirer rapidement les eaux de cette rivière, qui n'est qu'à cent toises de distance de l'épanchoir ; mais qu'il étoit supposé pour cela que la base du canal d'atterrissement seroit creusée jusques à la profondeur dudit seuil des pales les plus basses, & ensuite à niveau de pente ; que cependant, la difficulté qu'on a trouvé à excaver plusieurs parties de cette base, où l'on a rencontré du rocher & du gravier pétrifié, a été la cause que, bien loin de la déblayer à niveau de pente depuis l'épanchoir jusques à l'étang de Capestang, comme il avoit été projeté de le faire, on y a laissé au contraire sur les onze cents soixante premières toises, en partant de l'épanchoir, une contre-pente qui est telle que, près dudit épanchoir, ladite base est élevée de trois pieds six pouces au-dessus du seuil des trois pales les plus basses, en sorte qu'il ne reste plus que trente pouces de pente, au lieu de six pieds, depuis la rivière d'Aude jusques à la sortie des épanchoirs ; d'où il suit que la base du canal d'atterrissement, qui devroit être creusée au moins aussi bas que celle de la partie du canal de navigation qui lui fournit les eaux, est au contraire trois pieds six pouces plus élevée ; que les choses étant en cet état, il n'est pas étonnant que chaque inondation laisse de nouveaux dépôts dans ledit canal de navigation, & que ce qui confirme que le défaut de profondeur du canal d'atterrissement est la principale cause de ces dépôts, c'est qu'il a été remarqué plusieurs fois depuis deux ans que dès qu'ils sont parvenus au niveau de la base dudit canal d'atterrissement, ils ne s'accroissent que très-peu lors des inondations subséquentes.
Que d'après ces faits, il paroît hors de doute que le meilleur moyen d'obvier promptement à un aussi grand inconvénient pour la navigation du nouveau canal que celui qui résulte de l'envasement fréquent de la partie alimentée par la rivière d'Aude, consiste à approfondir celui d'atterrissement, de manière que sa base soit près de l'épanchoir un peu au-dessous du seuil des plus basses pales, & qu'elle aie ensuite une pente régulière jusques à l'étang de Capestang, ce qui présente un objet de dépense d'environ vingt-deux mille livres ; à quoi le sieur Ducros ajoute qu'à l'époque de l'inondation du 15 janvier dernier, lorsque les eaux furent parvenues à leur plus haut point d'élévation, le canal d'atterrissement fut tellement rempli qu'on fut obligé, pour éviter que les eaux ne surmontassent les chaussées, de fermer successivement jusques à sept empellements sur quinze dont l'épanchoir est composé ; d'où il résulte qu'il est indispensable d'augmenter la capacité du canal d'atterrissement pour que lors des grandes inondations, il puisse contenir toute l'eau limoneuse que l'épanchoir peut fournir, & qu'il remplisse ainsi le plus promptement possible l'objet auquel il est principalement destiné.
Qu'à ces motifs, le sieur Ducros ajoute que la base du canal d'atterrissement une fois portée à la profondeur de celle du canal de navigation, s'il se fait encore quelques dépôts dans ce dernier canal, on aura chaque année la facilité de les enlever avec la pelle pendant la chôme de la navigation, puisqu'en faisant alors un batardeau à l'embouchure sur le bord de la rivière, les eaux qui se trouveront entre cette embouchure & l'épanchoir se vuideront en entier dans le canal d'atterrissement.
Que ce Directeur observe enfin que dans le cas même où le recreusement proposé ne procureroit pas une vitesse suffisante pour empêcher qu'il ne se fît des dépôts assez considérables pour intercepter quelquefois le passage des barques, comme il faut nécessairement que les eaux limoneuses aillent de la rivière à l'épanchoir par le canal de navigation, pour être envoyées à l'étang, tous les moyens qui pourroient être proposés, autres que celui du creusement du canal d'atterrissement, ne pourroient tendre qu'au même but, qui est d'augmenter la vitesse du courant desdites eaux limoneuses ; que la réussite de ces moyens quelconques y seroit toujours contrariée par l'élévation de la base actuelle du canal de fuite de l'épanchoir au-dessus du canal d'introduction ; que ce seroit donc à l'approfondissement de ce premier canal qu'il en faudroit toujours venir, & qu'ainsi, il ne peut y avoir que de l'avantage à s'occuper au plutôt de son exécution.
Que le sieur de Montferrier a ajouté que pour aller du nouveau canal à la robine, il faut entrer dans la rivière d'Aude, la traverser pour passer à l'autre bord, & aboutir en longeant ce bord sur environ cent vingt toises de longueur à l'écluse de Moussoulens, par laquelle les eaux de la rivière sont introduites dans la robine ; que ce trajet présente deux obstacles à la facilité de la navigation ; le premier, que dès que les eaux sont un peu élevées au dessus de leur niveau ordinaire, ou seulement que les vents d'ouest soufflent avec force, la vitesse du courant s'accroît assez pour que les barques aient à craindre d'être entraînées contre la chaussée en essayant de traverser la rivière ; & le second, que la base du lit de cette rivière est, en quelqu'endroit, formée par des bancs de rocher, sur plusieurs desquels il y a moins de quatre pieds d'eau dans les temps ordinaires, en sorte que les barques chargées sont exposées à y toucher & à s'arrêter, ainsi qu'il est déjà arrivé à plusieurs.
Que pour obvier au premier inconvénient, il n'y a rien eu de mieux à faire que de placer une traille, dont le cable solidement fixé aux deux bords de la rivière est enlacé dans une forte poulie, d'où part une corde à laquelle les barques n'ont qu'à s'attacher pour que le courant les porte lui-même du côté opposé de la rivière.
Que pour ce qui est des bancs de pierres ou de roche au-dessus desquels il n'y a pas assez d'eau pour la navigation, on y a fixé des morceaux de liège qui, en surnageant, indiquent les endroits où ils sont, & on a placé à terre, vis-à-vis ces bouées, des piquets peints en blanc qui avertissent de loin. Que cependant, malgré ces divers signaux, quelques barques ont encore touché sur les rochers, y ayant été entraînées malgré elles par le vent d'ouest ; ce qui n'arrivera pas à présent que la traille qui vient d'être mise en place rend les patrons entièrement maîtres de choisir la route qu'il faut tenir après avoir traversé la rivière. Que par les sondes très-multipliées qui ont été faites dans tous les sens du lit de cette rivière, & sur toute l'étendue qui peut servir au passage des barques, il a été reconnu que les bancs de roche sont placés en groupe à peu près au tiers de la largeur de la rivière, & à environ dix toises du bord droit, de manière qu'ils laissent de part & d'autre un espece de canal assez large pour que les barques puissent y passer fort à l'aise ; mais qu'il faut remarquer que dans le canal, entre les rochers & le bord droit de la rivière, qui est celui qui seroit le plus commode à cause que le tirage se fait sur ledit bord, la profondeur n'y est pas constamment suffisante pour la navigation, n'y ayant été trouvé en dernier lieu que trois pieds six pouces d'eau ; & qu'en passant au-delà des rochers vers la chaussée, il peut arriver que le vent ou le courant porte les barques contre cette chaussée,
Que pour remédier à ces divers inconvénients, il se presente un moyen aussi peu dispendieux que facile à employer, & qui consiste à placer sur la chaussée un relèvement en charpente avec charnières pour le rendre mobile, ainsi qu'on en use à Beziers pour la traversée de la rivière d'Orb. Que la moindre hauteur des eaux au-dessus des rochers étant de trois pieds trois pouces, il suffiroit de donner dix-huit pouces de hauteur au relèvement pour que les barques les plus chargées pussent passer partout sans craindre d'y toucher ; que ce relèvement qu'on tiendroit abattu pendant le temps des inondations, étant remis dès qu'elle seroient passées, les eaux de la riviere se trouvant soutenues à dix-huit pouces au-dessus de leur niveau ordinaire, leur pente vers l'épanchoir, dont on tiendroit ouverts les empellements bas, seroit augmentée d'autant, & par conséquent la rapidité du courant destiné à entraîner les dépôts dans l'étang de Capestang. Que cependant, quelque utile que soit ce moyen, le sieur Ducros estime qu'il est convenable d'en différer l'exécution jusqu'à ce que l'expérience d'une année aie fait connoître plus particulièrement les divers inconvénients que peut présenter le passage de la rivière d'Aude dans les diverses circonstances, cette expérience étant très-propre à éclairer sur le choix des moyens à prendre, ainsi que sur la manière de les employer & de les proportionner aux effets qu'on voudra leur faire produire.
Que le sieur de Montferrier a dit encore : que pour compléter l'exécution de tous les ouvrages du canal de Narbonne, il reste encore à construire le pont à trois culées qui doit être placé à la réunion des deux canaux, ce qui entraîne le redressement d'une petite partie du Canal royal. Que cet ouvrage n'ayant pas été nécessaire pour l'établissement de la navigation, l'adjudication en a été différée pour ne pas contrarier la célérité de la construction des écluses par la trop grande multiplicité des atteliers de même espece ; mais que toutes les autres maçonneries étant à présent achevées, les Etats jugeront sans doute convenable d'autoriser MM. les Commissaires des Travaux-Publics pendant l'année à procéder à l'adjudication de ce dernier ouvrage.
Qu'étant nécessaire de pourvoir à l'entretien des maçonneries, portes d'écluses, francs-bords, & généralement de tous les ouvrages du canal, il est indispensable d'autoriser aussi MM. les Commissaires des Travaux-Publics pendant l'année à procéder à l'adjudication de cet entretien, sur le devis qui en sera dressé par le sieur Ducros.
Que ce Directeur expose qu'une grande partie des arbres plantés l'hiver dernier sur les francs-bords du canal, depuis la rivière d'Aude jusques au village de Salelles, étant morts, le nommé Calvet, habitant dudit village, a remis une soumission par laquelle il offre de se charger du remplacement de ces arbres & de les entretenir ensuite & remplacer jusques au premier avril 1792 , moyennant le prix de quatre livres pour chaque ormeau & celui de trois livres pour chaque tremble ; & quant aux arbres déjà plantés qui ont réussi, il s'oblige à les entretenir & à remplacer tous ceux qui mour[r]ont d'ici à ladite époque du premier avril 1792, moyennant le prix de sept sols & demi pour chaque ormeau par année, & celui de cinq sols pour chaque tremble.
Que le sieur de Montferrier a rappellé à la Commission qu'en même temps que les Etats délibérèrent le 28 décembre 1776 l'adjudication des premiers travaux du canal de Narbonne, ils jugèrent qu'il étoit convenable de prendre de bonne heure les précautions nécessaires pour prévenir les difficultés qui pourroient s'élever dans la suite, tant pour les limites du canal qu'à raison du jugement des différends qui pourroient naître entre les patrons & les autres personnes qui y navigueront depuis le grand Canal jusques à la mer, & qu'étant instruits que les lettres-patentes annexées à l'érection du Canal de M. Riquet, en l'érigeant en fief sur toute sa longueur & sur la largeur occupée par le Canal & ses francs-bords, contiennent les moyens les plus propres à remplir ces objets, ainsi que l'expérience l'a prouvé, ils délibérèrent de solliciter sur l'arrêt du Conseil rendu pour autoriser la construction du nouveau canal des lettres-patentes portant l'érection en fief dudit canal & de ses francs-bords sur toute son étendue jusques à la mer, ainsi qu'il en a été usé pour le grand Canal, & avec les mêmes droits, honneurs & privilèges ; & les Syndics-Généraux furent chargés de solliciter ces lettres-patentes ; mais que n'ayant été donné aucune suite à cette délibération, il paroît convenable, à présent que le nouveau canal est achevé, de ne pas différer davantage à solliciter lesdites lettres-patentes.
Qu'enfin, le sieur de Montferrier a dit qu'à raison de l'établissement du garde pour ce canal, dont il vient précédemment de rendre compte, MM. les Commissaires des Travaux-Publics avoient déterminé de lui fournir des armes & un habillement conforme à celui du garde du canal de Saint-Pierre à Toulouse, fourniture dont la dépense s'est élevée à quatre cent dix-huit livres quinze sols ; mais qu'ils jugèrent en même temps convenable de différer d'habiller le garde du Grau d'Agde, jusqu'à ce que les Etats eussent statué sur l'habillement uniforme de tous les gardes établis ou à établir sur les canaux de la Province.
Sur tous lesquels objets, la Commission a été d'avis de proposer aux Etats de délibérer,
1°. D'approuver les arrêtés pris par MM. les Commissaires des Travaux-Publics pour les réparations des dommages causés par l'inondation du 15 janvier dernier, pour la construction du logement du garde de la demi-écluse & le prolongement des murs d'épaulement, pour l'établissement d'un garde à bandoulière, & pour arrêter les filtrations des eaux du nouveau canal.
2°. De charger le sieur Ducros de faire procéder à l'estimation des indemnités dues à raison de ces filtrations.
3°. D'ordonner le creusement du canal d'atterrissement pour éviter les dépôts que les inondations de la rivière d'Aude laissent dans la partie du canal de Narbonne qui reçoit les eaux de cette rivière.
4°. D'autoriser MM. les Commissaires des Travaux-Publics à procéder pendant l'année à l'adjudication du pont qui doit être placé à la réunion des deux canaux.
5°. De donner pouvoir aux mêmes Commissaires d'adjuger l'entretien de tous les ouvrages du nouveau canal.
6°. D'accepter la soumission du nommé Calvet pour le remplacement & l'entretien des arbres plantés sur les francs-bords dudit Canal.
7°. De déterminer que les indemnités dont le verbal d'estimation a été rapporté seront payées aux particuliers auxquels elles sont dues.
8°. Que les sommes à employer au canal de Narbonne continueront d'être prises sur les fonds destinés aux travaux du dessechement des marais d'Aiguesmortes & du canal de navigation.
9°. De charger le Syndic-Général de solliciter des lettres-patentes portant érection en fief du canal de Narbonne & de ses francs-bords sur toute son étendue jusqu'à la mer, avec les mêmes droits, honneurs & privilèges mentionnés dans les lettres-patentes annexées à l'érection du Canal de MM. de Riquet.
10°. Daccorder à chaque garde un louis par an pour qu'il s'habille lui-même, & afin qu'il ne puisse divertir cette gratification, de lui fournir à ses frais l'habillement qui sera composé d'un habit de drap rouge doublé de jaune, avec une veste & culote de cette seconde couleur, & boutons de métal blanc, en en retenant le prix sur ses gages de la première année, & en lui fournissant en outre, aux frais de la Province, le fusil avec sa bayonnette & une bandoulière jaune, bordée d'un galon d'argent, avec une plaque d'argent gravée aux armes de la Province.
Ce qui a été ainsi délibéré sur tous les chefs, conformément à l'avis de MM. les Commissaires.
Economie |
17880108(07) |
Cours d'eau et voies navigables |
Les Etats approuvent les réparations du nouveau canal de Narbonne après l'inondation du 15/01/1787 pour drainer les eaux infiltrées, et l'installation d'un garde ainsi que son logement |
Action des Etats
Travaux publics et communications |
|
Economie |
17880108(07) |
Cours d'eau et voies navigables |
Les Etats ordonnent l'évaluation des dégâts dus aux infiltrations du canal de Narbonne, le creusement d'un canal d'atterrissement, l'habillement des gardes, l'adjudication du pont à la jonction de la robine, de l'entretien et de la plantation des arbres |
Action des Etats
Travaux publics et communications |
|
Economie |
17880108(07) |
Cours d'eau et voies navigables |
Le nouveau canal depuis le Canal royal jusqu'à l'Aude vient d'être achevé ; le 09/10/1787, l'arrivée de 3 barques est fêtée par un "concours innombrable des habitants de Narbonne et des environs" ; ses négociants économisent 3 à 400 l. sur chaque barque |
Action des Etats
Travaux publics et communications |
|
Economie |
17880108(07) |
Commerce |
Depuis l'ouverture du canal de Narbonne fêtée le 09/10/1787, plus de 30 barques y ont déchargé leur grain et chargé en retour du sel, du vin et du salicor ; les négociants épargnent 3 à 400 l. sur chaque barque par rapport au transport par charrette |
Action des Etats
Agriculture, élevage, commerce, industrie |
|
Gestion comptable |
17880108(07) |
Affectation de fonds |
Les sommes à employer au canal de Narbonne continueront d'être prises sur les fonds destinés aux travaux du dessèchement des marais d'Aigues-Mortes et du canal de navigation |
Action des Etats
Gestion financière et comptable |
|
Indemnisations et calamités |
17880108(07) |
Catastrophes |
Le 15/01/1787, l'Aude s'est élevée de 17 pieds 5 pouces, affouillant ainsi jusqu'au tuf à 12 pieds de profondeur au-dessous des basses eaux l'embouchure de tête du canal de Narbonne |
Action des Etats
Catastrophes et misères |
|
Agents et bureaux des Etats et des diocèses |
17880108(07) |
Petit personnel |
Uniforme des gardes du canal de Narbonne : habit de drap rouge doublé de jaune, veste & culotte jaunes, boutons de métal blanc, fusil avec sa baïonnette & une bandoulière jaune, bordée d'un galon d'argent, plaque d'argent gravée aux armes de la province |
Eléments concernant l'assemblée, ses membres et son fonctionnement
Institutions et privilèges de la province |
|