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Discours/Cérémonie

Discours d'un membre des Etats - E16490922(4)

Nature	Discours d'un membre des Etats
Code du discours/geste	E16490922(4)
CODE de la session	16490601
Date	22/09/1649
Cote de la source	C 7101
Folio	76r-77v
Espace occupé	3 p.

Texte :

Monseigneur l'archevesque de Narbonne a respondu : Messieurs, nous serions bien malheureux si le Con(se)il du Roy nous avoit creu capables de nous despartir tant soit peu des respects, soumissions, services et obeyssances que nous devons a leurs majestés, que nous avons toujours randues exactemant et que nous protestons de leur vouloir randre avec toutte sorte d'affections et de fidelitez inebranlables.
Que si nous voulions icy exposer les grands, importans et notables services que cette province a randus si glorieusement a noz Roys et a leur monarchie, nous ne serions pas obligez de remonter aux siecles passez et si eloignés de celluy cy. Tant de femmes vefves et enfans orphelins que nous voyons tous les jours dans noz villes et communautez qui n'ont pas encore essuyé leurs larmes des pertes qu'ils ont fait de leurs marys et de leurs peres dans ces memorables combatz et gains de batailhes pour le soutien et conserva(ti)on de l'estat, touttes ces glorieuses pertes, dis je, que nous avons faites sont autant de temoignages irreprochables de noz fidelités, de noz affections et de l'utillité de noz services, prostituant et abandonnant volontiers comme nous faisons en toutte sorte d'occasions et rancontres noz biens, noz familhes et noz fortunes pour le service de noz Roys, de noz souverains et de noz monarques.
Touttte la France, voire même toutte l'Europe ont veu avec admiration que la generosité de noz habitans a non seulement sauvé cette province mais de plus a mis tout l'estat en liberté, le deslivrant de l'incursion et de l'invasion du plus puissant et plus redoutable ennemy de cette couronne, et nous pouvons dire, et il est vray, que nous avons ancore cet avantage d'avoir fourny a touttes les provinces du Royaume voire même aux nations étrangeres les exemples glorieux de fidelité et d'affection pour le service de l'estat et du prince.
Nous avons a la verité pris deux deliberations sur le sujet de l'édit de Beziers pendant la tenue de ces Estatz, mais ny dans l'une ny dans l'autre nous ne nous sommes escartez en façon quelconque du procedé respectueux dans lequel nous nous sommes toujours pontuellemant contenus lorsqu'il a esté question d'user de plainctes ou de remonstrances envers les puissances supremes et souveraines.
Car en effet nous avons creu d'estre obligez en conscience dans l'une et dans l'autre de nosd. deliberations d'exposer simplemant et cotter respectueuzemant les griefs que nous avons contre l'edit de Beziers fait et publié contre les formes, dans la colere du prince et renversant entieremant noz libertés, noz immunitez et noz franchises dans lesquelles nous avons toujours vescu heureusem(en)t, et noz Roys nous y ont religieusemant maintenus pendant plusieurs siecles suivant l'obliga(ti)on qu'ils ont contractée avec nous lorsque cette province a esté joincte et est demeurée un des principaux fleurons de la couronne.
Et nous n'ignorons pas la differance qu'il y a entre privileges, libertez, immunitez et franchises, estant veritable que les privileges sont volontaires et depandent immediatemant de la liberalité du prince, mais aussy il est très constant q(ue) les immunitez et libertez sont d'une obliga(ti)on reciproque et irrevocable entre le souverain et ses sujets.
Et partant que les libertés et franchises avec lesquelles les peuples de ces contrées se sont donnez a cette monarchie doivent estre religieusemant et exactemant observées, car nous pouvons dire, et il est vray, que noz Roys ne peuvent aller contre cette justice publique et reciproque qu'ils ont solennellemant promize puisque Dieu mesmes duquel la puissance est infinie et illimitée se lie par sa bonté et par son equité aux promesses et aux parolles qu'il a solennellemant données aux creatures, et a souffert ensuitte et souffre tous les jours que les mêmes creatures luy fassent des remonstrances voire mêmes qu'elles disputent avec Sa Majesté tantôt sur l'ordre general de la providance, tantôt sur les maux, calamitez et mizeres tant generalles que particulieres qui n'arrivent que trop souvent parmy les hommes.
Et outre ces raisons generales et fondamentales de noz deliberations, nous ajoustons que nous estions obligez par le deu de noz charges de nous prevaloir des declara(ti)ons faites par Sa Majesté l'année precedante dans lesquelles nous trouvions la revoca(ti)on entiere de l'edit de Beziers puisqu'il n'avoit point esté veriffié suyvant le desir d'icelles dans le parlemant de Thoulouse. Et que nous serions blasmables devant Dieu et devant les hommes si nous, qui sommes les tuteurs et procureurs de cette province, ne procurions aux habitans d'icelle le soulagemant qu'ilz peuvent et doivent attandre avec tant de raison et de justice, ne pouvant leur denier noz soins, noz services et nos exactitudes en ce rancontre sans nous randre prevaricateurs dans la fonction de noz charges et peu soigneux des obligations que nous avons contractées par l'acceptation de l'employ ou nous sommes.
Puis mesmes que les peuples se trouvent dans des necessitez et extremitez si grandes que la plupart d'iceux seront constrainctz d'abandonner et deserter leurs biens, leurs possessions, leur pays et leurs familhes, si on ne modere l'excessiveté des subsides qu'on leur a fait souffrir et qui les ont accablez depuis longues années.
Joinct aussi que nous croyons assuremant qu'en nous prevalant de la justice que le Roy nous presante par des actes si solennelz et si publicqs que c'est servir Sa Majesté très utillemant en ce rancontre puisque nostre principalle visée est de maintenir les peuples de ces contrées dans la vollonté et dans le pouvoir d'assister Sad. Majesté lors qu'elle sera en volonté et en age d'entreprandre quelque choze pour la gloire de Dieu, pour la conserva(ti)on de ses estatz et pour la grandeur de sa couronne.