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Discours/Cérémonie
Discours de l'un des commissaires du roi - E16610329(01)
Nature |
Discours de l'un des commissaires du roi |
Code du discours/geste |
E16610329(01) |
CODE de la session |
16610124 |
Date |
29/03/1661 |
Cote de la source |
C 7125 |
Folio |
235r-236v |
Espace occupé |
2,25 |
Locuteur
Titre |
M. de Bezons |
Nom |
Bazin, de |
Prénom |
np |
Fonction |
Intendant |
Texte :
En suitte de quoy Mond. sieur de Bezons a dict :
Messieurs,
Puisque j'ay cest avantage d'expliquer les intentions de Sa Majesté dans ceste compagnie illustre remplie de personnes esclairées et qui ont tant de respect pour les volontés de leur souverain, je ne crois pas estre obligé d'uzer de beaucoup de raisons pour vous faire cognoistre vos veritables intheretz et qu'il suffit de vous les propozer, puisque vous ne manquerés pas de rectiffier par vos dernieres pensées ce que l'on a trouvé qui manquoit a vos premieres desliberations.
Le Roy a appris avec desplaisir les resolutions que vous avés prises de luy offrir cinq cens mil livres et puis huict cens mil livres, et la derniere desliberation que vous avés prise de luy donner un million de livres a fait cognoistre que ceste assamblée se mettoit en devoir de satisfaire Sa Majesté, et le roy a consideré ceste somme comme un premier pas qui vous portera a une plus grande offre et qui soit proportionnée a vos forces et au besoin de l'Estat. Il est vray que la guerre a cessé et que nous devons la paix a la justice des armes de nostre monarque, a la pietté de la reyne sa mere et aux conseilz du grand ministre qui nous l'a procuré, et lorsquil estoit en estat de nous en faire gouster les fruitz et les avantages, le ciel jaloux de nostre bonheur nous l'a ravi pour arrester l'envie que concevoient les autres peuples de la terre de nostre bonne fortune.
Nimium romana propago
Visa potens supperis, propia haec si dona fuisssent.
Ceste perte sensible a l'Estat seroit fatalle et irreparable sy nostre prince dans le printemps de son aage ne renonçoit a tous les plaisirs pour se sacriffier a l'intherest de ses peuples, et dans les premieres reflections qu'il fait sur les besoins de son Estat, sur la necessité qu'il y a de soustenir une paix naissante qui engage dans ses premiers commancemens a d'aussy grandes despances que la guerre, il a pensé qu'il devoit attandre de vous un secours beaucoup plus considerable que celuy que vous luy offrés et dont il ne se peust contenter sans accabler d'autres provinces qui sont espuisées, ces provinces n'ont point d'intercesseurs pour les preserver des orages qui les menassent et il faut que le Roy consulte la tendresse de son cœur et de sa justice pour ne les pas accabler et pour vous demander que vous aydiés a porter les despances de l'Estat dont vous faittes une si noble partie.
Je scay que vos affections n'ont point de bornes et que l'amour que vous avés pour les peuples qui vous ont confié leurs inth(erets) vous empeschent d'agir dans toute l'estandue de vostre zelle. Mais il ne faut pas tellement se revestir des sentimens de ceux qui nous font agir que nous ne nous despouillons de cest amour propre pour eslever nostre esprit a la cognoissance du bien general du royaume ; l'ame de l'homme n'est pas cappable de gouverner ses passions lorsqu'elle y est engagée, mais il faut qu'estant unie par sa partie supperieure a la divinitté d'ou elle tire son origine elle gouverne les passions qui luy sont soubmises sans s'y laisser abuser, figure excellante de Monseig(neu)r le prince de Conty, qui, se trouvant attaché a la royauté par sa naissance, par son debvoir et par son inclination, a neantmoins pour ceste province une affection toutte entiere, et dans ceste juste balance, cognoissant vos miseres, mais cognoissant les necessittés de l'Estat, peust estre un moyen legitime pour vous procurer les graces du roy en faisant de vostre costé des effortz qui soint proportionnés a la grandeur de ceste province.
Ceux qui se sont signalés dans des occasions extraordinaires sont obligés de faire tousjours des grandes chozes pour soustenir ceste reputtation qu'ils se sont acquise, le Roy ne peust estre mieux informé de l'estat de ceste province que par les acistances que vous avés données au feu roy son pere et par celles que vous luy avés données a luy mesmes. Il est juste que vous receviés des fruits de la paix, mais lorsque Sa Majesté considerera ce changement si soudain dans vostre conduitte, cela luy donnera peut estre des impressions qui ne s'effasseront pas avec facilité, et c'est par son ordre exprès que nous vous disons qu'il n'est pas satisfait d'un million de livres et que Sa Majesté n'acceptera point de don gratuit a moins que vous n'augmantiés d'une somme considerable.