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Discours/Cérémonie


Discours d'un membre des Etats - E16591001(04)

Nature Discours d'un membre des Etats
Code du discours/geste E16591001(04)
CODE de la session 16591001
Date 01/10/1659
Cote de la source C 7125
Folio 005r-006v
Espace occupé 3

Locuteur

Titre Monseigneur
Nom np
Prénom np
Fonction Archevêque de Narbonne


Texte :

Monseigneur l'archevesque et primat de Narbonne a respondeu :
Messieurs,
Vous scavés, M(essieur)s, qu'entre les passions de l'ame il n'y en a point quy ayt des charmes sy puissantes que la joye et quy se produise sy aisemant et se fasse cognoistre par des carcateres plus vifz et plus estendus ; les autres, quoyqu'elles ayent une mesme source, ont pourtant des canaux bien differens et des signes equivocques qui ne les distinguent pas tousjours assés, mais la joye, lorsqu'elle a remply le cœur de l'homme, on ne peut la contenir, elle se respend partout, et les mouvemans qu'elle excite au dedans sont sy naturellement depeintz au dehors qu'il est impossible de la cacher, elle sort de l'interieur par tant d'ouvertures qu'elle inonde en un moment les yeux, le front et le visage, et ces plus nobles parties de l'homme, qu'on soupçonne ordinairement de dissimulation, ne sçauroint deguiser ses transportz agreables.
Cette veritté, Messieurs, paroist aujourd'huy sur voz visages, il n'est pas besoin de discours pour exprimer les sentimans de voz cœurs qui se produisent assés d'eux mesmes dans cette illustre compagnie, laquelle depuis près d'un siècle n'a point veu de sy beau jour ny plus digne de ses rejouissances.
Les assemblées des années precedentes n'avoyent que des causes de tristesse, de larmes et de gemissemens, la continuation de la guerre, les desordres publicz, les immenses levées, l'accablement du peuple soubz le faix des charges excessives estoint la matiere la plus frequente de noz desliberations, et nous n'estions occupés qu'a chercher les moyens de prolonger une vie languissante et nous defendre de l'insolence et de la cruauté du soldat.
Les resolutions de noz estatz n'estoint pour l'ordinaire que des plaintes, des doleances et des remonstrances au Roy sur l'estat deplorable ou la guerre avoit reduict cette province.
Mais aujourdhuy, Messieurs, que noz miseres vont prendre fin par la paix, par ce don du ciel pour lequel nous avons sy longtemps soupiré, noz premieres pensées doibvent se porter a Dieu, comme a l'autheur d'un bien qui n'estoit pas en la puissance des hommes, il avoit depuis longtemps inspiré a nostre prince le desir de la donner a son peuple sans lui en descouvrir les moyens, et il n'a pas pleustost recogneu quelques dispositions favorables dans les conseils de ses ennemis abbatus soubz ses victoires que, prefer[a]nt le repos de ses subjectz a la gloire de ses triomphes, sans escouter les mouvemans que la valeur inspire ordinairemant dans un cœur aussy grand que le sien, il a mieux aymé, par un genereux effort sur son courage, donner des bornes a ses conquestes que de retarder le bonheur de son peuple.
C'est donques, après Dieu, a Sa Majesté que nous sommes redevables de noz premiers remerciemans, puisque par la pieté de sa vie, la prudence de ses conseils et la justice de ses actions, il nous a merité un bien d'un prix inestimable, de sorte que nous pouvons dire, Messieurs, que c'est aujourdhuy un jour de resurection pour la province, jour que le Seigneur a faict, auquel il semble n'estre pas permis de mesler rien de triste ny de lugubre.
Toutesfois, quand je considere la place que j'occupe, je suis obligé d'advouer que vostre joye ne peut estre parfaicte, n'estant pas possible que vous ne portiés vostre triste pensée sur la perte de celluy quy vous a sy dignement presidé durant le cours de tant d'années et pendant des temps sy difficiles que dans les tempestes furieuses dont l'Estat a esté sy grandement combattu, il nous a par son adresse faict jouir de quelque sorte de tranquilité au milieu de l'orage et de la confusion quy agitoit le reste du royaume, c'est luy, Messieurs, et vous le scavés, quy par sa fermeté et sa constance inesbranlable au service du Roy a rompeu les flotz et les violentes secousses des agitations et des mouvementz des provinces voisines qui devoint inonder et submerger la nostre.
Les obligations que nous lui avons sont d'une nature a ne pouvoir estre oubliées, et il n'est pas possible d'en rafraichir la memoire sans regretter une perte sy considerable, vostre consolation et la miene ne doit estre que le calme et la bonace dont nous allons jouir, il n'est pas besoin d'un pilote fort habile et fort inteligent.
Je me cognois trop bien, Messieurs, pour me flatter des louanges et des qualités que vous venés d'entendre comme des marques de l'affection et de la civilité de la personne qui me les a données.
Mais j'espere que pour m'acquiter d'une charge qui est infiniment au dessus de mes forces je seray secouru et esclairé des lumieres de tant d'illustres personnes eminantes en verteu et d'une sagesse consommée dont cette compagnie est remplie, vous asseurant, Messieurs, que je les recevray tousjours avec respect et soubmission, comme je le vous demande avec instance, vous conjurant d'avoir la bonté d'excuser les fautes que je pourrois commettre, puisque je vous fais cette protestation publicque et solennelle de ne manquer jamais de passion et de zele pour vous servir.
Ne differons pas davantage de tesmoigner noz recognoissances a cette grande et illustre princesse quy, ayant tousjours inspiré au Roy des sentimans de paix et par la force et l'assiduité de ses prieres [a] contrainct le ciel de nous la donner lorsque nous en desesperions, nous lui en avons donques une partye de l'obligation aussy bien qu'aux conseils de S. A. R. Monseigneur le duc d'Orleans quy, ayant essuyé tant de fatigues dans des campagnes glorieuses pour reduire noz ennemis a la raison a faict enfin triompher la pieté de la valeur et s'est donné a lui mesmes cette paix qu'il nous avoit conservée par son authorité dans la province, pour laquelle il a tousjours faict paroistre des sentimans de tendresse et d'amour pleustost d'un pere que d'un gouverneur.
Mais admirés vous point, Messieurs, la sagesse et la conduitte de ce ministre incomparable quy a sceu se prevaloir sy advantageusement de tous les momens favorables pour la perfection de ce grand ouvrage de la paix, qu'il a forcé noz ennemis qui l'auroient tousjours opiniatrement refusée a nous la demander et qui en trois ou quatre mois a terminé ce que l'entremise et la mediation de tous les princes de l'Europe n'avoi[en]t quasy peu esbaucher pendant pleusieurs années, et cella avec tant d'adresse et sy peu de bruict qu'il a eslevé ce beau temple de la paix sans que nous nous en soyons aperceus, comme autrefois Salamon (sic) celluy de Jherusalem sans faire entendre aucun coup de marteau.
Vous cognoissés mieux que personne, Messieurs, l'extremité ou la province a esté reduite et les besoins que nous avions de ce presant du ciel, mais nous scavons aussy que nous ne serions plus en estat d'en profiter sy par l'authorité de voz charges, par le soin, l'amour et le zelle que vous avés tousjours eu pour cette province vous ne l'eussiés preservée de sa ruine totale, nous vous en demandons la continuation comme nous vous asseurons de noz reconnoissances et de noz très humbles services.